2011-12-16

Compte rendu d’utilisation de la Méta Mallette

Compte rendu d’utilisation de la Méta Mallette

Compte rendu d’utilisation de la Méta Mallette
Philippe GUILLEM
Ecole Maternelle A.Camus 33400 Talence
2010 / 2011

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Objet : Observation d’ une utilisation “non directive” de la Méta-Mallette par des jeunes enfants
Mots Clé : Méta-Mallette, Maternelle, Non directif*
Lien : http://www.pucemuse.com/
Constat de départ :
Enseignant Maître Formateur en Musique et travaillant en collaboration avec le Studio de Création et de Recherche et Informatique et Musique Electroacoustique ( SCRIME Bordeaux I ) j’ai choisi d’utiliser la Méta-Mallette développée par PUCE MUSE, dans ma classe de Moyenne et Grande Section.
Les protocoles d’utilisation de la Méta-Mallette proposés par PUCE MUSE pour les enfants me semblaient très directifs. Leur objectif était à ma connaissance de permettre à un groupe d’interpréter une pièce écrite, dans un temps relativement bref. J’ai choisi d’observer comment des jeunes enfants pouvaient découvrir et s’approprier cet instrument sans protocole pré-établi.
Le dispositif :
La Méta-Mallette est installée en classe en permanence, son accès est libre. Les élèves l’utilisent au moment de l’accueil et lorsqu’ils ont terminé leur activité de classe. Il s’agissait d’une Méta-Mallette version 2 ; avant le passage aux objet 3D . La configuration était simple; 4 manettes contrôlant 4 instruments MémAccel avec leur mapping (configuration) d’origine. Seuls les sons ont été modifiés , chaque instrument utilisant un son différent tiré de la banque fournie avec la mallette. Il est à noter que les sons d’origine n’appelaient pas immédiatement les enfants à se représenter quelque chose de connu( grésillements, sifflements craquements…).
Les Observations :
  1. Phase de découverte libre :
L’observation a duré pendant trois mois, pendant lesquels les élèves avaient la possibilité d’utiliser la Mallette en classe quand et comme bon leur semblait. Les observations ont été faites ponctuellement par prise de note ou enregistrement vidéo.
  • Premières prises en main : Les élèves vont spontanément vers ce nouveau jeu installé dans la classe. Il s’en saisissent soit avec une seule main soit parfois deux mains. Aucune consigne d’utilisation n’est donnée, si ce n’est que l’appareil est relativement fragile et qu’il faut y faire attention au même titre que les autres jeux de la classe. Les élèves manipulent les manettes manifestant leurs interrogations au sujet de l’objet. « Qu’est ce c’est ? » « cela ne marche pas ! » « Comment cela marche ? ». En appuyant accidentellement sur la gâchette, certains déclenchent l’instrument. Les réactions sont vives et les interrogations suscitent rapidement des échanges verbaux, des recherches, des explications entre élèves. Les élèves focalisent uniquement sur l’image.
  • Premiers Jeux : Passée la phase de découverte les élèves commencent à organiser de petit jeux, basés sur ce qui est affiché à l’écran. Essentiellement des jeux construit à partir des objets affichés à l’écran et sur l’association de ces objets à un joueur. Un peu comme dans la cour de récréation ils jouent à « T’es ou ? », « Coucou je suis là ! », « Je suis caché ! » en utilisant le relâchement de la gâchette pour faire disparaître l’objet de l’écran. Ces premiers jeux peuvent voir le jour à partir du moment ou les élèves commencent à associer un objet à l’écran avec un utilisateur du dispositif. Le langage et les échanges permettent ces associations. A partir de cela, les élèves vont pouvoir construire des jeux d’interactions du type « Tous sur lui! », « Tous dans un coin! », « Cache Cache! ».
  • Premières remarques :
  • On observe qu’a ce stade les élèves ne semblent pas tenir compte des sons produits par les instruments. Je n’ai pas noté de marques ou d’attitudes d’écoute dirigées vers le son, de commentaires à propos des sons… Les enfants semblent être avant tout dans l’action, dans le mouvement, et sont accaparés par le mouvement des objets à l’écran. Probablement en écho à leur propre désir de mouvement et d’action.
  • Les échanges verbaux sont au cœur des jeux. Le jeu se situe véritablement devant l’écran entre les protagonistes. La machine semble n’être qu’un support, un moyen de laisser des traces de ce jeu. La machine est partagée au même titre que l’espace physique, à l’image d’un terrain de jeu. Cela renforce, à mon sens les propos de Serge de Laubier qui souhaite proposer un instrument virtuel, collectif, qui préserve et suscite les « échanges réels »; contacts physiques, regards, échanges verbaux au sein d’un espace physique partagé.
  1. Phase de découverte accompagnée :
Nous avons donc été amenés à nous poser suivante: Comment amener ces enfants à prendre conscience des associations Image/Son/Mouvement que propose la Méta-Mallette ?
A ce stade nous avons choisi de travailler dans deux directions. D’une part essayer de faire en sorte que les élèves prennent conscience « sensoriellement » de la présence de ce son. D’autre part de leur proposer la possibilité de mettre du sens sur les sons de l’instrument. Ceci afin que les élèves puissent reconnaître ces sons et les prendre en considération lors de leur jeu avec les instruments.
  1. Accompagnement Sensoriel
Dans ces situations de découverte de l’instrument, à l’évidence les sons étaient perçus par les joueurs; en tout cas ils étaient perçus par toutes les autres personnes présentes en classe à ce moment là. Nous avons donc mis en place des ateliers de Méta-Mallette qui à notre avis devaient permettre aux élèves de mieux prendre en considération les sons produits par les instruments. Par petits groupes de quatre dans une salle isolée du reste de la classe , nous leur avons proposé un atelier composé de 3 temps.
1 Utilisation libre de l’instrument avec la configuration d’origine (4 MémAccel)
2 Utilisation Libre de l’instrument ; écran éteint.
3 Utilisation libre de l’instrument avec écran à nouveau en service.
Lors de la prise en main de l’instrument écran éteint les élèves ont manifesté énormément d’étonnement. Il semblaient percevoir les sons « comme pour la première fois ». Cela se manifestait par: un arrêt du jeu, un arrêt des échanges verbaux, des plages de silence, des postures d’écoute (immobile les yeux grands ouverts ), des essais de « marche / arrêt » avec la production du son.
Lors du troisième temps de l’atelier avec remise en fonction de l’écran. Nous avons constaté la reprise des jeux comme pendant le premier temps de l’atelier. Il semblerait que dans ces cas d’utilisation libre, le jeu avec l’image prévale grandement sur le jeu avec le son, au point de le recouvrir totalement.
  1. Accompagnement Sémantique
  • Sens et langage
Nous avons cherché à proposer aux élèves, des sons qu’ils puissent reconnaître. Pour cela nous avons modifié la configuration initiale en remplaçant les sons d’origine des instruments par des prénoms d’enfants de la classe. La réaction des élèves a été surprenante et instantanée. En découvrant la possibilité de jouer avec les prénoms, ils ont pris des attitudes d’écoute, tout comme lors de la phase « sans écran » des ateliers précédemment cités. Cependant l’écran était toujours allumé et les objets se déplaçaient sur l’écran. Avec la possibilité de mettre un sens sur les sons entendus , les élèves ont pu immédiatement se centrer sur l’écoute des sons de l’instrument. Ils ont pu percevoir et jouer avec les possibilités de modification du sons; choses qui jusqu’alors n’avaient pas été remarquée et encore moins explorée. Il leur était à mon avis plus facile de percevoir les modifications appliquées au son car il connaissaient bien le son initial de référence (prénom). Avec cette configuration d’instrument nous avons pu observer des enfants qui jouaient toujours avec les images de l’écran ,mais qui aussi jouaient avec les déformations qu’ils appliquaient au sons des prénoms de la classe.
Les élèves sont même allés au delà de ces jeux simples. Spontanément ils sont allés vers l’utilisation des instruments pour la construction de petites séquences rythmiques qui manifestement les conduisaient à « danser ». Ils sont sortis des reproductions de jeux « sociaux » pour fabriquer une musique capable de mettre le corps en mouvement.
  • Sens et Corps
Cette année j’ai repris l’utilisation de la Méta-Mallette dans la classe mais dans sa version 3 avec une configuration différente: 1 MémAccel / 2 MémaSample / 1 MémaScratch. Les élèves tout comme lors des essais précédents, se saisissent de l’instrument assez facilement. Les premières découvertes passées, contrairement à ce que l’on avait pu observer lors de la première session, j’ai eu la surprise de voir les élèves danser en même temps qu’ils jouaient la Méta-Mallette. La différence essentielle réside à mon avis, dans le fait que les MémaSamples utilisés étaient programmés avec des boucles de batterie. Visiblement ( audiblement devrais-je dire ) ces boucles comportaient suffisamment de sens pour détourner l’attention des élèves de l’image de l’écran vers le son. Le son était bien présent et pris en compte dans leur jeu. Le corps par la danse manifestait une certaines intelligibilité du son produit par l’instrument.
  1. Quelques éléments de conclusion.
Quelques brèves conclusions à tirer de ces petits moments d’observation.
  • Les enfants sont spontanément très curieux de l’instrument.
  • Ils prennent beaucoup de plaisir à jouer ensemble avec la Mallette.
  • La mallette suscite énormément d’interactions entre les joueurs. Des rires de complicité, des échanges verbaux très divers ( explications, encouragements, ordres, conflits …)
  • Spontanément ils ne considèrent le son que s'ils ont une bonne raison; s'ils comprennent « quelque chose » de ce son. Pour cela il semble nécessaire qu’ils puissent associer ce son à quelque chose de connu, d’intelligible; une parole (prénoms), un comportement (danse). Dans ces deux cas seulement les élèves, interagissent intentionnellement  avec le son. Ils jouent des silences, des répétitions, des boucles, des réponses; ils arrivent à structurer véritablement leur production sonore.
Merci à Estelle Lepinard étudiante en Master de Musicologie qui a conduit les ateliers d’accompagnement sensoriels.
Merci à Serge de Laubier, Nolwen Hugain, et Puce Muse pour leurs conseils et la Méta-Mallette.
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